La population du village de Port-Etal menait une existence tranquille, rurale, quasi moyenâgeuse et heureuse. Puis vint le jour de la Douleur : les habitants découvrirent alors la souffrance et la mort. C'est à ce moment que deux étrangers, Jason et Justice, arrivèrent de nulle part chez le forgeron du village. Avec pour seule requête que Lared, son jeune fils, écrive leur histoire. L'histoire de Jason Valois, considéré comme un Dieu.
Publié en 1989, "Jason Valois" est un roman et le premier des deux volumes composant le cycle "La Geste Valois". Le second volume, "Contes de Capitole et de la forêt des eaux", est un recueil de nouvelles mettant en scène les personnages du roman et se déroulant avant. Il doit impérativement être lu après, pour comprendre le contexte.
Le roman alterne deux récits : la trame principale raconte l'hiver que passent les Valois auprès du jeune Lared. Lorsque ce dernier dort, par télépathie et sous forme de rêves, Justice lui transmet les souvenirs des Valois qu'il est chargé de retranscrire sur papier. On découvre la vie simple et dure des habitants du village et les rapports qu'ils entretiennent avec ces singuliers visiteurs.
La seconde trame, c'est bien évidemment les rêves, les souvenirs de l'histoire des Valois. Tout commence des milliers d'années plus tôt, sur la planète Capitole, ultrapeuplée, technologique et dominatrice. C'est là que vit, avec sa mère, le jeune Jason. Sa particularité, c'est qu'il est le fils d'un "fluide", Homère Valois, chef d'une rébellion passée et responsable de huit milliards de morts. Jason est donc, en quelque sorte, un paria et il est amené rapidement à rencontrer Abner Doon, l'homme le plus puissant de Capitole et également celui qui provoquera la destruction de celle-ci.
L'histoire de Jason est bel et bien un récit de science-fiction, étalé sur des milliers d'années. Au début du roman, on ne comprend évidemment pas comment on a pu partir du jeune Valois sur Capitole et aboutir à la planète rustique de Lared.
Tout cela est amené de façon intelligente et on prend beaucoup de plaisir à avancer dans l'histoire. De plus, Card met une nouvelle fois en scène des enfants dans les rôles principaux et il faut reconnaître qu'il est doué pour cela.
Cependant, deux choses m'ont gênées à la lecture du roman.
Tout d'abord, passé le premier tiers des 400 pages, on connait tout ou presque de l'issue de l'histoire des Valois. Ce n'est pas qu'on s'ennuie, loin de là, mais il ne faut pas s'attendre à des révélations fracassantes dans la dernière ligne droite.
Le second point qui m'ennuie, c'est que toute cette histoire me semble imbibée d'une morale bien-pensante tournant autour de la rédemption, de la bonté de l'homme enfouie en lui-même lorsqu'il est responsable d'actes abominables. J'ai trouvé cela vraiment lourd par moments. Difficile en tout cas de ne pas faire le lien avec les croyances de Card.
C'est un thème récurrent chez cet auteur, mais bien moins digeste ici que dans "La Stratégie Ender", publié 3 ans plus tôt et autrement plus réussi.
Mais malgré ces réserves, il me serait difficile de déconseiller la lecture de ce beau roman.
"Jason Valois" est publié en France par L'Atalante.