La question peut paraître saugrenue, mais c'est ce que je finis par croire. Que les cultivateurs se rassurent, loin de moi l'idée de remettre en cause les qualités universellement reconnues du fruit du pommier. Je parle bien sûr des produits commercialisés par Apple. Et que les fans de Steve Jobs soient également rassurés, je ne vais pas remettre en cause les qualités du matériel de Cupertino. Non, du tout, car j'aimerais en fait vous parler d'une nouvelle race d'individus de plus en plus actifs sur le net : les "Apple haters". Ceci est une révolution.
Tout a réellement commencé avec l'iPod. Pas à son lancement, non, mais lorsque le lecteur d'Apple est devenu populaire, quelques années plus tard. En fait, tellement populaire que cela s'est transformé en véritable raz-de-marée... Dans les transports en commun, il devenait bien rare de voir des écouteurs autres que les classiques - et pourtant si mauvais... - "petits blancs" de l'iPod. D'un coup d'un seul, du matériel flanqué d'une pomme croquée touchait le grand public, et se vendait par millions dans le monde entier. Mais avant de parler des conséquences de ce succès, un petit retour en arrière s'impose.
Flashback, vingtième siècle, 1984. "One step beyond".
Dans mes souvenirs, même en remontant au lancement du premier Macintosh, les produits Apple ont toujours généré des réactions pour le moins irrationnelles. Mais la déclinaison la plus intéressante, à mon sens, consistait en un groupe de gens plutôt étranges que l'on nomme encore aujourd'hui les "fan boys". Faisant preuve d'une "foi" sans limite et sacrifiant souvent toute forme d'objectivité, on pourrait facilement les imaginer comme les membres d'une secte un peu déjantée dont le gourou serait Saint Steve. Et comme je parle du boss, il me faut signaler qu'il les a bien aidés après son retour dans la firme qu'il avait co-fondée avec l'autre Steve : c'est ce qu'on appelle le "champs de distorsion de la réalité" de Steve Jobs, particulièrement virulent lors des keynotes. J'avoue que cela m'a souvent fait bien rire, comme les discours sur l'incroyable puissance du processeur G5 d'IBM, fichtrement plus véloce que les brouettes d'Intel. Ouais, enfin jusqu'en janvier 2006 avec le passage du Mac sur architecture CoreDuo, tellement... plus véloce que les anciennes machines !
Revenons à l'iPod et à l'invasion des écouteurs blancs. Ce phénomène va favoriser la timide éclosion des premiers Apple haters dont l'argument massue sera repris quelques années plus tard : "les acheteurs d'iPod sont des moutons et achètent ce produit parce que c'est à la mode". Bien sûr. Le hater de l'époque, encore un peu jeune, ne se posera pas d'autre question sur les raison du succès de l'iPod. Finition, simplicité d'utilisation et de synchronisation ne sont pas des arguments recevables, l'iPod est un truc de mouton.
Le succès de l'iPod va de paire avec la montée en puissance du net. Le développement des haters et des fan boys également. Blogs, forums de discussions, sites techniques ou généralistes, ils sont à l'aise partout.
Mais l'iPod, ce n'est rien du tout, le meilleur reste à venir. En 2006 et 2007, Apple va commettre deux erreurs impardonnables, que dis-je, fatales !
La première, c'est le passage des Mac sur une architecture Intel. Pour la première fois, les Mac utilisent les mêmes composants que leurs frères ennemis, les PC à la sauce Redmond. La traditionnelle guerre Mac/PC n'est plus, le Mac EST un PC. C'est l'étape 2 de l’ascension des Apple haters, et c'est du méchant qui tache. La communauté va grossir considérablement : on peut désormais comparer objectivement - raclement de gorge... - les machines. Vous vous doutez du résultat non ? Le Mac c'est plus cher et moins bien, détails techniques à la clef bien sûr.
La seconde faute d'Apple est la plus lourde. Nous sommes en 2007 et Apple présente l'iPhone. C'est l'état d'urgence chez les fan boys qui entrent en phase d'hystérie collective totale. Souvenez-vous de ces "héros" qui campaient devant les Apple Store aux USA pour être sûrs d'être parmi les premiers acheteurs...
Révolution pour les uns, révélation pour les autres : à partir du premier modèle d'iPhone, les Apple haters ne vont plus cesser de croitre. Pensez donc : ce téléphone est nul, il est pas 3G, il est horriblement cher, on ne peut rien faire avec et y'a pas Flash ! Un an plus tard, le modèle 3G arrive, accompagné de l'App store. Puis le 3GS et enfin le 4. L'iPhone est un succès invraisemblable, mais le hater s'adapte à son environnement. Apple c'est l'enfer de la fermeture et de la censure. Et puis... Vous rendez-vous compte ? Tout le monde a un iPhone ! Les acheteurs d'iPhone sont des moutons ! Ca ne vous rappelle rien ?
Ceci nous amène jusqu'à l'an dernier, au printemps 2010. Là, on va tutoyer les sommets, toucher au véritablement sublime avec le lancement de l'iPad. Côté fan boys, j'avoue avoir été quelque peu déçu par des réactions finalement pas si hystériques que ça. Faut dire, il eut été bien difficile d'égaler l'orgasme collectif de la sortie de l'iPhone !!! En revanche, les haters nous ont gâté avec.... comment dire.... cette "chose", ce gros iPod touch tout enflé qui ne sert à rien, complètement bancal, ça ne marchera jamais, qui est horriblement cher et puis on ne peut même pas surfer sur le web parce que y'a pas Flash ! La routine finalement. Tout comme, quelques mois plus tard, l'"affaire" de l'iPhone 4 qui ne permet même pas de téléphoner, au point d'être déconseillé tout à fait officiellement par "Consumer Reports" aux USA.
Nous voilà au terminus provisoire de cette petite aventure, en mars 2011. Apple a vendu des millions d'appareils sous iOS. L'iPhone a pas mal inspiré les concurrents et est aujourd'hui une sorte de référence sur le marché. Tout smartphone est systématiquement comparé à l'iPhone. L'iPad, le bidule étrange et inutile, s'est vendu à des millions d'exemplaires et a fait cavalier seul ou presque sur le marché naissant des tablettes tactiles. La concurrence arrive, avec des dizaines de modèles. L'iPad 2 sort et risque de cartonner lui aussi. Pourtant ses cameras vidéos font des photos nulles, il n'a pas d'écran "Retina" en haute densité - c'est digne d'un Minitel ! - il n'a que 512 Mo de RAM - c'est notoirement inutilisable ! - et puis.... y'a pas Flash, donc impossible de surfer sur le web !
En attendant les prochaines grandes manœuvres, sans doute la sortie de l'iPhone 5, le net nous abreuve de "hateries" plus anecdotiques. Tiens, par exemple, la mise à jour 4.3 d'iOS. Vous savez quoi ? Les applications web sous forme d'icône sur le springboard tournent plus lentement que lorsqu'elles sont lancées directement dans Safari. Vous comprenez ce que ça cache n'est-ce pas ? C'est une CONSPIRATION d'Apple pour privilégier les applications téléchargées sur l'App Store ! Encore et toujours la routine...!
Cinq ans après la présentation des premiers MacBook, rien n'a changé non plus. Il suffit de lire les commentaires sur les tests des MacBook Pro sortis en début de mois pour s'en convaincre. Et puis de toute façon, les acheteurs de Mac sont des nuls blindés de thune qui achètent des machines sous-puissantes et hors de prix. Ce n'est pas un geek ou un gamer qui achèterait un truc pareil ! Alienware peut dormir tranquille.
Qu'on ne s'y trompe pas, loin de moi l'idée de proclamer que tout ce que sort Apple est parfait. Loin s'en faut et l'histoire de la firme montre que ses produits souffrent régulièrement d'imperfections, dysfonctionnements, lacunes ou faiblesses en tous genres. Mais le bruit que génère chaque "affaire" ou chaque sortie de produit est devenu, au gré des années, tout simplement délirant.
Allez, pour terminer, je n'ai aucun doute sur le fait que je suis catalogué "fan boy" de classe internationale : iPod, Macs, iPhones, iPad, je suis complètement FOUTU, les neurones cramés par la propagande de Saint Steve. Je suis un mouton. Mais pas de panique les haters, je vous aime quand même car vous me faites bien marrer !
Bêêêêê !